WINDSOR, Canada – Elle est née à Montréal, ce qui suffisait déjà pour nourrir la fierté de la communauté haïtienne. En prime, depuis qu’elle a nagé aux Jeux olympiques de Rio, Naomy Grand-Pierre sert de contrepoids aux malheurs naturels qui ont affligé Haïti.
La nageuse de 19 ans a marqué l’histoire de ce pays en devenant la première femme à participer à des Jeux olympiques. Le 12 août, sa 56e place à l’épreuve du 50 m style libre a été perçue comme un symbole davantage qu’un résultat pour ses grands-parents paternels et maternels, oncles et tantes, cousins et cousines qui habitent à Montréal.
«Oui, on peut le dire. Ça a été un moment historique», note la jeune fille qui a participé cette semaine à trois épreuves aux championnats du monde en bassin de 25 m à Windsor.
Nager pour ne pas se noyer
La vie de Naomy a commencé lorsque celui et celle qui allaient devenir ses parents se sont rencontrés après leurs études universitaires à Montréal. Un an après sa naissance, en avril 1997, les Grand-Pierre ont laissé leurs familles respectives derrière eux au Québec pour déménager à Atlanta pour les besoins du travail, un peu aussi «parce qu’il fait froid à Montréal!»
Aux États-Unis, c’est pour prémunir ses enfants contre un fléau qui existe en Haïti que sa mère a inscrit sa fille aînée à des cours de natation, puis les quatre frères et sœurs de Naomy.
«On évalue à seulement 1 % la population d’Haïti qui sait nager. Chaque famille peut dire qu’un cousin, un oncle ou un frère s’est noyé. Ma mère a certains de ses cousins et cousines qui se sont noyés parce qu’ils ne savaient pas nager. C’est un gros problème en Haïti», soulève-t-elle.
«Chaque famille haïtienne a une histoire triste comme celle-là à raconter. C’est quelque chose qu’on tend à vouloir changer dans le pays.»
« Une vie unique »
Même si elle ne sait pas ce qui l’attend après ses études en psychologie à l’Université de Chicago, elle se réjouit de savoir que ses parents projettent de revenir vivre à Montréal dans les prochaines années. Sa triple citoyenneté haïtienne, canadienne et américaine lui offrira diverses options, mais il y aura toujours beaucoup du Québec dans son âme.
«Oui, j’ai grandi aux États-Unis, mais j’ai été élevée en langue française avec les coutumes haïtiennes. Je ne regardais pas la télé américaine quand j’étais petite. Je regardais les émissions en français de Radio-Canada», raconte la nageuse qui s’est offert sa visite annuelle à Montréal pour voir la famille après les Jeux de Rio.
«C’est un privilège pour moi que d’avoir eu accès à différentes cultures. Je ne suis pas strictement haïtienne, québécoise ou américaine. Je suis d’abord haïtienne en raison de l’origine de mes parents, mais le Québec et les États-Unis sont égaux pour moi. J’ai une vie dans une famille qui est unique.»
Vers 2020
Haïti pourra compter longtemps sur Naomy Grand-Pierre pour populariser la pratique de la natation et initier d’autres jeunes Haïtiens au mouvement. Elle souhaite ne pas être la seule fille aux Jeux de Tokyo en 2020, ce qui renforcerait son espoir d’éviter d’autres histoires de noyade dans la «perle des Antilles».
«Mes parents et moi, on pense que c’est important pour Haïti. On espère que tous les gens dans le pays auront un jour le même accès à notre sport dont moi et mes frères et sœurs avons pu bénéficier dans notre vie.»
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Source/Journal de Québec
Photo/Archives
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